La première Assemblée des lauréats : bâtir l’innovation sociale de demain

Le 21 novembre dernier, s’est tenue au Conseil économique, social et environnemental la première Assemblée des lauréats de La France s’engage.

Dédiée à la réflexion sur les défis à relever au cours des dix années à venir, la journée a réuni l’ensemble des parties prenantes de la communauté La France s’engage : ses 204 lauréats et ses entreprises mécènes, des représentants du gouvernement et des hauts fonctionnaires, des scientifiques et des universitaires, des décideurs locaux et des élus, ainsi que des représentants de l’économie sociale et solidaire.

Ensemble, nous avons échangé sur l’avenir de l’innovation sociale et la manière d’amplifier son potentiel pour générer plus de progrès social et transformer la société à l’horizon 2034.

Regarder l'histoire commune, penser l'avenir

L’événement a donné aux lauréats un espace de discussion, où leurs initiatives et leurs leviers de développement pouvaient être explorées sous un angle collectif.

La réflexion s’est appuyée sur le Livre blanc de l’innovation sociale, présenté pour la première fois. Ce document synthétise les recommandations formulées par les lauréats et les parties prenantes de La France s’engage, qui ont participé à une vaste consultation menée de mai à juillet 2024.

Composé de 67 propositions, le Livre blanc a pour ambition de bâtir les bases d’un futur progrès social en s’appuyant sur les réalités du terrain.

Thierry Beaudet, président du Conseil économique, social et environnemental, a accueilli l’Assemblée en rappelant que la véritable force de la société civile réside d’ailleurs dans sa capacité à s’organiser par elle-même, à travers des initiatives locales qui complètent et parfois anticipent l’action de l’État. Cette complémentarité entre l’action publique et les acteurs de l’économie sociale et solidaire a été au cœur des débats de l’Assemblée.

Entre réalité territoriale et impact concret

Damien Baldin, directeur général de La France s’engage, a souligné en préambule la richesse des actions menées par les lauréats, qui ne se contentent pas de répondre à des besoins sociaux de manière uniforme. Ces initiatives, qui constituent la colonne vertébrale du Récit d’impact 2014-2024 de La France s’engage, dévoilé pour l’occasion, prennent en compte la diversité des épreuves de vie, qu’il s’agisse de personnes confrontées à la maladie, au handicap ou à la précarité.

C’est cette prise en compte de l’individualité, tout en maintenant un lien social fort, qui fait la singularité de l’innovation sociale. Une tension entre l’accompagnement personnalisé et la création de communautés solidaires, qui a trouvé un écho dans les discussions de l’Assemblée.

Enora Hamon, directrice générale adjointe, a également évoqué le financement et l’accompagnement des structures, points essentiels pour leur développement. Depuis sa création, La France s’engage a soutenu ses lauréats par un financement conséquent de 55 millions d’euros et par 15 000 jours de mécénat de compétences, un chiffre impressionnant qui témoigne de l’engagement des entreprises dans l’économie sociale. Ce soutien a permis à de nombreuses initiatives de se structurer, de se professionnaliser, et ainsi d’avoir un impact concret sur les territoires.

Le Livre blanc : un outil de discussion pour un avenir commun

Le Livre blanc de l’innovation sociale a été l’outil phare de cette journée. Ses 67 propositions ne sont pas des revendications, mais des pistes d’action à discuter et à concrétiser. Damien et Enora ont rappelé que La France s’engage souhaite faire vivre ce document, en l’utilisant comme une plateforme de dialogue entre les différents acteurs de la société civile, les entreprises, l’État et les collectivités.

Les propositions, classées selon leur facilité de mise en œuvre et leur coût, abordent des enjeux cruciaux, qui ont en commun l’ambition d’améliorer le quotidien des plus vulnérables et de renforcer la solidarité à l’échelle nationale.

La consultation qui a mené à la rédaction de ce Livre blanc a été particulièrement riche, recueillant près de 4800 contributions. Ces propositions ne visent pas seulement l’amélioration des structures de l’ESS, mais aussi des actions concrètes à mener dans les territoires. Le Livre blanc a été conçu pour être un outil de débat, avec une priorité donnée à la mise en œuvre des propositions, en particulier celles qui ne nécessitent pas de financement massif ni de réformes législatives complexes.

Une transformation en cours

Le bilan des dix premières années de La France s’engage met en lumière des réussites concrètes. Les structures lauréates, présentes sur l’ensemble du territoire français, ont su toucher près de 10 millions de bénéficiaires à travers 1400 implantations territoriales. Ces chiffres soulignent l’impact tangible des initiatives, souvent dans des zones peu couvertes par les politiques publiques traditionnelles.

La France s’engage a joué un rôle clé dans la structuration de ces projets, en fournissant un soutien financier flexible et durable, ce qui a permis à de nombreuses initiatives de se professionnaliser.

Le modèle de financement, souvent qualifié de « massif » et pluriannuel, est unique dans l’écosystème associatif. Il est perçu comme un véritable levier pour les associations, leur permettant de se concentrer sur leur mission sans être constamment confrontées à la recherche de financement. Ce modèle a fait ses preuves, mais des efforts supplémentaires restent nécessaires pour garantir une plus grande pérennité des structures sociales et pour encourager une plus grande reconnaissance de l’impact de ces initiatives.

Vers de nouvelles collaborations : le rôle des entreprises et des collectivités

L’Assemblée a aussi mis en lumière l’importance de la collaboration entre les associations et entreprises sociales d’une part et les entreprises du secteur privé dites “traditionnelles” d’autre part. Si les entreprises ont été des mécènes importants pour La France s’engage, il existe encore des défis à surmonter en termes de compréhension mutuelle. Les entreprises et les structures de l’économie sociale ont parfois des attentes différentes, ce qui peut freiner des collaborations plus fructueuses. Un travail de rapprochement est nécessaire pour créer des synergies plus efficaces, en particulier dans le domaine du mécénat de compétences, qui représente un atout pour de nombreuses structures.

Les collectivités locales, elles aussi, jouent un rôle clé dans le développement de ces initiatives. La France s’engage souhaite renforcer la coopération avec les territoires, afin de faire en sorte que les solutions proposées par les lauréats soient réellement adaptées aux réalités locales et qu’elles bénéficient du soutien nécessaire pour se déployer à grande échelle.

Un travail d'approfondissement collectif

Ces sujets ont été explorés plus en profondeur à l’issue de quatre tables rondes, chacune abordant des enjeux clés pour renforcer l’impact de l’innovation sociale à tous les niveaux.

Voir les intervenants des tables rondes.

La première, « Auprès des pouvoirs publics : dialogue et coopération », a ouvert le débat sur les obstacles administratifs, législatifs et réglementaires freinant l’innovation sociale. Comment faciliter le passage des projets innovants en politiques publiques ? Comment aider les élus locaux à répondre aux besoins sociaux non satisfaits ? L’occasion de réfléchir à de nouvelles formes de coopération entre acteurs publics et privés.

La deuxième table ronde, « Auprès des entreprises : la responsabilité sociétale de demain », a exploré le rôle du secteur privé dans l’innovation sociale. Si de nombreuses entreprises ont déjà intégré des stratégies RSE, elles restent parfois peu enclines à s’engager pleinement dans des initiatives sociétales. Les discussions ont porté sur la manière de renforcer cet engagement à travers le mécénat de compétences, la gouvernance et le soutien à l’innovation sociale.

La troisième session, intitulée « Par la recherche en sciences sociales : pour un GIEC du social ? », a mis en lumière la nécessité d’une plus grande collaboration entre la recherche et l’économie sociale et solidaire. Les intervenants ont souligné l’importance de développer une « recherche-action participative » qui inclut les bénéficiaires dans le processus de recherche et d’innovation sociale. La question d’un GIEC du social a également été soulevée, avec l’idée d’un rassemblement mondial de chercheurs et d’acteurs pour favoriser les progrès sociaux.

La dernière table ronde, « Dans les médias : plaidoyer et influence », a permis de discuter de la manière de faire exister l’innovation sociale sur l’agenda médiatique et auprès de l’opinion publique. Comment renforcer la couverture médiatique des initiatives et influencer les politiques publiques ? Cette table ronde a exploré de nouvelles pistes pour rapprocher les porteurs de projets et les médias, et ainsi attirer l’attention sur les solutions sociales émergentes.

L’après-midi, réservé aux lauréats de La France s’engage, a permis de passer de la réflexion à l’action à travers trois ateliers pratiques. Les participants ont travaillé sur la création de coalitions locales, le développement de l’innovation sociale dans les collectivités territoriales à travers l’exemple de la commande publique, et la mobilisation des agents et fonctionnaires territoriaux à travers le mécénat de compétences. Ces ateliers ont permis de confronter les expériences et de partager des bonnes pratiques.

En parallèle, 3 acteurs clés de l’écosystème (l’AFEV, l’Ascenseur et Impact Tank) ont fait part de leur retour d’expérience sur les coalitions inspirantes en matière de plaidoyer et de politiques publiques.

En fin de journée, les lauréats ont voté pour les propositions du Livre blanc qu’ils estiment les plus prioritaires. Ce travail collaboratif marque le début d’un an d’efforts collectifs pour définir une feuille de route destinée à porter les propositions du Livre blanc auprès des différentes parties-prenantes.

L'Assemblée 2025 à venir pour suivre les avancées

L’Assemblée des lauréats de La France s’engage a permis de poser les bases d’une réflexion collective sur l’avenir de l’innovation sociale. Le travail entamé avec la présentation du Livre blanc ne fait que commencer. L’objectif est désormais de mettre en œuvre ces propositions et de suivre leur progression au fil des mois. En 2025, une nouvelle Assemblée sera organisée pour évaluer les progrès réalisés, faire un bilan de la mise en œuvre des propositions et, si nécessaire, ajuster la feuille de route pour les années à venir.

La France s’engage, aux côtés de ses 204 lauréats et de ses partenaires, continuera à œuvrer, à son niveau, pour encourager et accompagner toujours plus de progrès et de justice sociale en France.

Crédit photos : JM Gautier / Agence Oblique

Crédit Vidéo : Max Riché / Agence Oblique